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Une exposition au Louvre : "Gravures en clair-obscur"




"Gravures en clair-obscur - Cranach, Raphaël, Rubens" (Musée du Louvre, 18 octobre 2018 - 14 janvier 2019)


Le Louvre a décidé de très peu communiquer au sujet de cette exposition. Aucune banderole n’est déployée nulle part, pas sur la façade de la place du Palais-Royal, cela va de soi, mais pas davantage dans le hall, de sorte que pour savoir lequel des escaliers roulants il faut emprunter, il faut en faire la demande à un gardien. Sachez donc que le bon escalier est celui de l’entrée Sully, après quoi il n’est que quelques pas à faire.


Il y a trois bonnes raisons d’aller à cette exposition.

D’abord, sa discrétion garantit tranquillité et confort de visite. Nous sommes loin à cet égard de la presse et des files d’attente de la récente Exposition Delacroix.

Ensuite, elle réunit des oeuvres qui n’avaient jamais été présentées à Paris sous le trait commun d’être des gravures “en clair-obscur”. Ce terme désigne une technique de coloration des gravures consistant non pas à les colorier à la main après impression mais à transférer les couleurs lors du passage sous la presse, au moyen de planches de bois ou de plaques de métal dites “planches de teinte”. Les gravures ainsi réalisées, d’une gamme tonale limitée, font jouer ombres et demi-teintes, à la manière de sanguines, de dessins au lavis, à fond coloré ou à rehauts de gouache. La rencontre, plus ou moins frontale, de ces effets de lumière et de ceux produits par la précision du trait de burin procure de suaves émotions visuelles.

Enfin, de telles oeuvres ne produisent leur plein effet qu’en vision directe. Les reproductions photographiques sur papier glacé en distordent les dimensions, en écrasent les délicats détails, détruisent leur velouté, leur grain, lequel tient au papier de grande qualité qui était utilisé.


Antonio da Trento : Vierge à l'enfant, d'après Parmiginanino


En sous-titre, l’exposition aligne les patronymes illustres de Cranach, Raphaël et de Rubens. Si nous sont présentées quelques gravures sur bois de Cranach (Saint Georges, Saint Christophe), Raphaël et Rubens ne sont invoqués que pour avoir offert leurs peintures en modèles à de talentueux graveurs restés dans l’ombre : Christoffel Jegher, “le Maître ND”, Nicollo Vicentino, Parmigianino, Antonio da Trenta, Ugo da Carpi… Cette obscurité n’ôte certes rien à leurs mérites. Et si Domenico Beccafumi, Hendrick Goltzius, Albrecht Dürer, également représentés dans l’exposition, portent des noms plus retentissants, ce qui reste, c’est tout de même la vision d’un immense savoir-faire qui, à force d’énergie et d’application, se répandait à l’époque sur un grand nombre d’artistes. Toute exposition consacrée à l’art de la gravure nous conduit à cette constatation rassurante sur les vertus du travail, laquelle rend vaine ou injuste la distinction que le Romantisme nous a habitués à pratiquer entre le génie qui inspire et fulgure et le simple talent qui fait vivre et donne une profession.

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