"Avant, la vie était plus simple" (G. Duhamel)
- La Stryge
- 7 nov. 2018
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Dernière mise à jour : 5 janv.

Il me semble que la vie, si l'on s'en tient à des conjonctures analogues, était beaucoup plus simple en ce temps-là (les années 1890 à 1894), et par conséquent plus facile qu’en 1938, par exemple, c'est-à-dire à la veille de la Seconde Guerre mondiale. L’appareil législatif était beaucoup plus succinct, L'administration moins ramifiée, moins touffue, la bureaucratie modeste, la paperasserie raisonnable. Un citoyen de condition moyenne payait un impôt cinquante fois moins lourd que celui qu'il verse aujourd'hui pour des ressources équivalentes. Les plaisirs populaires étaient sans doute plus rares et plus ingénus, mais ils étaient plus vivement goûtés. Nous avions alors des remèdes moins nombreux et moins actifs, en revanche les causes de blessures ou de maladie étaient moins variées, moins offensives (...). L'appareil des lois sociales ne dispensait pas encore aux multitudes laborieuses cette protection dont nous pourrions tolérer l’agressive complexité si nous la sentions opérante.
Il est absolument vain de critiquer la marche d’un monde en proie à tous les délires, et je n’y perdrai pas mon temps. J'ai maintenant 58 ans sonnés. J'ai vu, pendant le demi-siècle où j'ai tenu les yeux grands ouverts, plus de transformations que le monde n'en a connu pendant deux millénaires. Il est inconfortable de vivre dans les remous d’une telle révolution, qu’on me permette de le dire. Et j'ajouterai, songeant aux misères de nos sociétés fiévreuses et me reportant à ce qu’était la vie difficile d’une famille pauvre, à la fin du siècle dernier : comme il faisait bon être malheureux en ce temps-là ! (G. Duhamel : Inventaire de l’abîme, 1941-1942 ; Paul Hartmann, p. 111).
Merci pour cet éclairage sur Georges Duhamel. Son parcours de médecin-écrivain résonne particulièrement aujourd'hui avec nos questionnements sur l'humanisation de la médecine.
L'influence méconnue de Duhamel sur la médecine narrative
Ce que peu savent, c'est que Duhamel a été précurseur d'un mouvement aujourd'hui reconnu : la médecine narrative. Ses écrits sur l'expérience du soin, notamment dans "Vie des martyrs" (1917), ont posé les bases d'une approche plus humaine de la pratique médicale. Cette œuvre, écrite pendant la Grande Guerre, témoigne de sa vision révolutionnaire du patient comme être total, pas seulement comme pathologie.