

"La douceur du grand rêve siennois" (J. Green)
En octobre 1931, Julien Green est devenu un habitué de la salle des Sept Colonnes laquelle, à cette époque tout comme aujourd’hui, regroupe au Louvre les primitifs italiens de petit format, Florentins et Siennois mêlés. Green goûte plus particulièrement ces derniers. L’Ecole de Sienne, alors n’était pas vraiment ni comprise ni aimée. Les historiens de l’art en ce début du XXe siècle, Burckardt mais Berenson également, ne comprennent ni n’admettent qu’en plein Quattrocento, l’


Où est le vrai Julien Green ?
"6 août 1931. - Je me souviens qu'autrefois, dans mes rêveries de la quinzième année, j'imaginais qu'un bon livre était le résultat d'un jeu de hasard. L'auteur déposait des myriades de mots comme on remue des grains de sable, et sans cesse il en changeait l'ordre, jusqu'au moment où par miracle il obtenait un certain ordre et du même coup Le Rouge et le Noir ou Esther. J'étais obsédé par l'idée que tous les livres possibles sont dans le Dictionnaire de la langue, et qu'il su


"Pourquoi n'être pas né plus tôt ?" (J. Green)
"11 novembre 1940. Je me demande quelquefois pour quelle raison je suis né à cette époque, une époque avec laquelle je me sens si peu d'affinités. C'est au passé que je demande, en effet, ce dont j'ai besoin, et un passé souvent fort lointain. Je ne me sens pas chez moi en 1940. J'ai à l'égard du téléphone et de beaucoup d'inventions modernes les sentiments qu'en aurait pu avoir un homme du Moyen-Âge. Les livres que je relis ne sont presque jamais les livres de mes contempora


Si les routes n'existaient pas...
Dans tout l'univers, je crois que rien n'est plus chargé de pensées humaines qu’une route. Sur tous les grands chemins où passent les hommes, à pied, à cheval ou en voiture, on a construit des romans, rêvé des assassinats, préparé des révolutions et travaillé peut-être au bien de l'humanité. Si les routes n'existaient pas, s'il devenait possible de se rendre dans l'instant même d'une ville à l'autre, l'activité mentale de la race humaine faiblirait au bout de quelque temps et


"Ceux qui n'ont point changé la face de la terre" (J. Green)
"7 novembre 1937. - Hier à l'exposition de Peinture chinoise, dans une des salles de la Bibliothèque nationale. Il y avait peu de monde et j'ai pu me griser de ce que je voyais. Un petit paysage de saules m'a rendu si heureux que je ne savais plus comment faire pour le quitter. J'aurais voulu être, non dans le coin de Chine que représentait cette peinture, mais dans cette peinture même. Elle est un des aspects de ce grand pays dont j'ignore le nom, et qui n'en n'est pas moins

"Cet instant unique" (J. Green)
6 octobre 1967. - Hier, visité les salles du Louvre où sont exposées, provisoirement, les peintures du XIXe siècle (...). Une toile de Bertin qui m'a fait rêver : on y voit une maison frappée par le soleil couchant, du linge qui sèche sur une corde, de grands arbres, minute merveilleuse qui ne reviendra jamais, il n'y aura plus jamais cela, ce soleil doré sur cette maison, cet instant unique (J. Green, Ce qui reste de jour, Journal 1966-1972 ; O.C., Biblioth. de la Pléiade, 1


"Travaillons jusqu'à ce que tout s'écroule" (J. Green)
27 avril 1929. - Plon m'offre un contrat qui m'engagerait pour 15 ans. Que de guerres et de révolutions auront balayé les contrats avant 1945 ! C'est déjà beaucoup de vivre à cinq ans, dix ans sans grand dommage. Loin d'empoisonner ma vie, cette pensée qui me quitte rarement donne à l'heure présente une saveur extraordinaire. Tout projet d'avenir me paraît de plus en plus utile. Mais faisons comme si tout était solide et travaillons jusqu'à ce que tout s'écroule (J. Green, Le


Les émeutes du 6 février 1934 : ce qu'on en pensait alors
Que se passa-t-il le 6 février 1934 ? Ce jour-là, le ministère Daladier devait se présenter devant les Chambres. Les conseillers municipaux de Paris, liés aux Ligues, appellent, avec l'Union nationale des combattants, à manifester. L'Association républicaine des anciens combattants (communiste) décide de se mobiliser le même jour contre “le régime du profit et du scandale” et pour exiger l'arrestation du préfet de police Chiappe. À 20 heures le Palais-Bourbon est cerné. UMC,


"Le pays perdu" (J. Green)
Une des plus belles pages inspirées à un écrivain par l'Ecole de Sienne (il est vrai qu'ils ne sont guère nombreux à en avoir parlé et moins encore à en avoir été émus !) : 8 octobre 1931. Au Louvre. L'Enlèvement d’Europe, par Francesco di Giorgio [ou Liberale da Verona]. Devant une peinture comme celle-là, j'ai l'impression que le monde disparaît, ou plutôt qu'un autre monde se substitue au nôtre. Voici que nous pénétrons de plain-pied dans les contrées du rêve. À ma connais


"Ils ont grandi à une époque paisible" (A. Malraux)
"27 mars 1930. Déjeuner avec Malraux, à la Pergola, avenue du Maine (...). Nous parlons de la jeune génération littéraire, celle de 20 à 25 ans, et du peu d'intérêt de ce qu'elle fait. “Que voulez-vous qu'ils fassent ? demande Malraux. Ils ont grandi à une époque paisible, ils n'ont pas éprouvé la secousse d'une guerre ou d'une révolution, qui nous aura été si utile” (J. Green, Les Années faciles, Journal 1926-1934 ; Biblioth. de la Pléiade, 1975, p. 63). Malraux ne fait ici